vendredi 28 novembre 2008

Entretiens d'actualité n°25

Yves-Claude Stavy : Dans les services

A. Bande-Alcantud, Yasmine Grasser, Ursula Seibert, P. Tagle-Barton

ENTRETIENS D’ACTUALITÉ

25

le vendredi 28 novembre 2008 (2)

Yves-Claude Stavy : Dans les services

Je travaille depuis un an au CPCT-Chabrol. Je ne fais donc pas partie de ceux qui démarrèrent l’expérience. Fabien Grasser me proposa d’apporter ma contribution à ce qui était entrepris rue de Chabrol. J’ai tout de suite accepté. De bon cœur. Ce que j’y entreprends est passionnant.

Je me suis toutefois étonné de ne pas trouver tant de différence que cela, avec ce que nous entreprenons, en consultation, à Aubervilliers : chacun, là aussi, s’associe à chacun pour se risquer dans une pratique clinique du tout venant, gratuitement, en s’orientant de Freud et de Lacan. Un temps hebdomadaire, là aussi, réunit tous les acteurs, afin de parier sur la transmission, puis sur la discussion d’un cas clinique précis.

Sans doute, des différences demeurent. Le CPCT Chabrol, ce n’est pas la consultation d’Aubervilliers. A Chabrol, on est sensé permuter. A Auber, les acteurs de la consultation, moins nombreux, ne permutent pas. Pas non plus de limite de temps dans ce qui est entrepris avec chaque patient. Certains poursuivent avec l’un d’entre nous durant plusieurs années.

Différences, donc. Et pourtant, en ce qui me concerne, un même enthousiasme, voire une sorte de mêmeté : le pari d’une communauté partageant une orientation, dans laquelle chacun est encouragé à exposer les avancées, les impasses, les problèmes, rencontrés dans chaque cas en s’orientant de Freud et de Lacan. Pourquoi donc, à Auber, faisons-nous figure d’exception dans le champ de la psychiatrie publique, en ne cédant pas sur ce point ? Les services dirigés par un membre de l’Ecole ne se comptent certes pas par centaines. Mais ils ne sont pas non plus si rares. Pourquoi tant de discrétion sur ce qui se joue dans chaque institution, au un par un ?

Je me suis demandé si les problèmes actuellement isolés par J-A Miller à propos des CPCT, ne trouvaient pas une origine dans la sorte de glissement progressivement intervenu au sein de la plupart des services de psychiatrie publique. Je ne parle pas de n’importe quel service de psychiatrie. Je parle des services dont les responsables sont des membres de l’Ecole.

Que fait-on aujourd’hui dans ces services ? En quoi, comment, y est-on aujourd’hui subversifs, innovants, dérangeants, craints (pourquoi pas ?) des psychiatres responsables des autres services d’un même hôpital ? Pourquoi ces profils bas ? A quels dieux obscurs collaborons-nous de la sorte ? Suffit-il d’accueillir, une fois par mois, une unité de la Section clinique, ainsi que ses enseignants, pour qu’il s’agisse d’un service de psychiatrie orienté par Freud et Lacan ?

Qu’en est-il de nos pratiques quotidiennes ? Hier, on se formait à la clinique dans certains services précis, tandis qu’on entreprenait une psychanalyse et qu’on démarrait un contrôle en s’adressant à tels ou tels psychanalystes de l’Ecole : d’un côté, la formation clinique; de l’autre, ce qui était engagé personnellement, sous l’égide de l’Ecole. Lacan, semble-t-il, donnait beaucoup d’importance à ce qui était entrepris par les jeunes Internes dans les services de psychiatrie. Mais l’Ecole, c’était autre chose : dans les services, la présence des aînés, le savoir faire de l’expérience, des lieux de formation clinique dans lesquels chacun engage sa propre mise ; à l’Ecole, les enjeux de la psychanalyse pure, d’autres offres aussi, mais qui ne seraient rien sans celle-là, prévalente, causale.

Les Sections cliniques trouvent certes aujourd’hui l’accueil de tel ou tel service de psychiatrie. Quid des acteurs pris au un par un, dans chacun des services concernés? Peut-on trouver encore aujourd’hui, au sein de services de psychiatrie publique, dans la durée, occasions de transmissions, de conversations, de disputes, de confrontations, indispensables à une formation clinique conséquente s’orientant de Freud et de Lacan?

Ma thèse est la suivante : la pertinence autant que les problèmes actuellement isolés par JAM à partir des initiatives CPCT résident dans une fonction de suppléance – inquiétante - opérée via l’Ecole, faute de services de psychiatrie en mesure d’offrir aujourd’hui, auprès des jeunes, un champ de formation clinique digne de ce nom. Par le biais des CPCT, l’Ecole, plus ou moins directement, ‘pourvoie’ elle-même aujourd’hui à la formation clinique des jeunes. C’est une suppléance inquiétante, car elle repose sur une grave confusion des genres. Sur cette confusion des genres, résonne le glissement d’intérêt accordé aux activités proposées à l’Ecole: des enjeux de la passe (progressivement désinvestis), on est passé à un investissement grandissant des soirées et journées de psychanalyse appliquée. Il est urgent de sortir de cette double embrouille :

1) Les structures associatives de type 1901 ne peuvent servir de voile plus longtemps à ce qui est -et à ce qui n’est pas - entrepris au sein de services de psychiatrie publique dirigés par des membres de l’Ecole. On peut, si on le veut vraiment, travailler aujourd’hui en psychiatrie publique avec Freud et Lacan. Je dirai même, qu’on le peut plus que jamais. Freud et Lacan, ce n’est pas la psychiatrie d’hier, c’est l’avenir. A condition de s’y mettre tout de suite.

2) A condition que l’Ecole, quant à elle, parvienne tout de suite à parier, à nouveaux frais, sur les enjeux de psychanalyse pure. Sans concession. Demain, ce serait trop tard.

Le 12 novembre 2008

YASMINE GRASSER : Les langues qu’on parle

-A (un administratif) : Bonjour, installez-vous…. Vous êtes du cpct ? Vous allez nous expliquer ce que signifie cpct ?

-Moi : Oui, le cpct est.…

-A. : Mais c’est très intéressant !... Des psychanalystes bénévoles....

-Moi : Nous avons souhaité mettre la psychanalyse au service du tout-venant…

-A : Quand même la psychanalyse est thérapeutique… Ah ! si vous faisiez comme les assistantes sociales : des groupes de paroles à thème, une fois par mois, alors peut-être nous pourrions envisager de vous donner une subvention, 1000 euros par an par exemple…

-Moi : Ah ! si nous faisions les assistantes sociales ! C’est une idée, je ne manquerais pas d’en parler à notre directeur !...

Ces quelques répliques ne m’ont pas laissé tranquille, bien que cela ne se soit pas reproduit. Mais chercher des subventions, c’est aussi parfois rencontrer le visage de la haine pour la psychanalyse, et à peine déguisée ! Nous cherchons des subventions pour fonctionner et nous faire connaître. Je ne suis pas sûre que l’unité familles soit un pseudopode (les unités du cpct). Le cpct-chabrol a été ouvert au tout-venant sans distinction d’âge. Très vite, un élément de sécurité a montré qu’il était difficile de recevoir dans le même temps des tout-petits et des ados, ou des enfants et des adultes. Actuellement, 9h sont attribuées aux enfants, c’est un peu étroit. Il est probable qu’à Paris, le cpct ne disposera jamais d’un local gratuit. D’où ma préoccupation pour élargir le débat sur ce qu’on dit selon l’interlocuteur. Il y a la langue :

- Celle qu’on parle avec les administratifs, les politiques et l’extérieur.

- Celle qu’on parle dans un entretien.

- Celle que nous parlons entre nous, dans nos discussions cliniques.

Avec les administratifs ou à l’extérieur, j’utilise, comme le dit Francesca Biagi Chai, les termes de psychanalyste et de psychanalyse. Ces mots aujourd’hui appartiennent à la langue commune, bien que leur usage public reste imprécis, ou plein de préjugés. Il y a de ce fait nécessité d’expliciter le contenu que nous lui donnons. Donc de parler du travail qui se fait dans l’École de la Cause freudienne sur la "précarité symbolique", nom que nous donnons au malaise contemporain, et de parler de la formation longue et solide de ses membres. Cela conduit à faire valoir qu’il y a au cpct des analystes expérimentés (équipe A) qui assurent les supervisions (en groupe) et les contrôles individuels (hors cpct) des plus jeunes en formation (équipe B). Il m’avait été demandé une fois, s’il y avait des supervisions, terme qui s’est implanté dans beaucoup d’institutions. Il y a aussi les termes utilisés pour parler des objectifs du cpct qui sont plutôt bien reçus, ils permettent de parler avec nos interlocuteurs, et parfois ils en soulagent. Par exemple : "la rencontre avec un psychanalyste", "de traiter par la parole une difficulté ", "il n’y a pas de cure analytique au cpct".

L’expression "psychanalyste bénévole" me semble bien formée. Le bénévole est celui qui veut bien et de son plein gré se dévouer à une cause. Le bénévolat fait lien social, c’est notre époque. Nos interlocuteurs comprennent cela très bien, ils servent aussi une cause, mais ils ignorent ce qu’elle est. Nous nous savons que la cause que nous servons dans le discours analytique offre une forme de lien social nettoyé de toute jouissance. Le terme de "militant" utilisé au début de l’École est aujourd'hui assez dévalué. Je ne pense pas qu’il faille utiliser le terme de "psychothérapeute" trop ambigu à mon sens.

Il me paraît donc très important d’élaborer entre nous une façon de parler qui résulte des élaborations collectives que nous mettons à l’épreuve dans nos discussions cliniques. À l’extérieur, notre façon de parler devrait nous différencier, nous devrions aussi pouvoir donner des réponses précises comme sur la question du transfert où nous sommes souvent attendus.

En entretien. Les patients eux viennent avec le terme de psychologue, souvent donné avec l’adresse du cpct. Ce terme semble bien ancré, et plutôt positivement dans le public qui vient nous voir. C’est un terme par exemple qui est entré dans le vocabulaire des enfants, ils savent ce que c’est. C’est plus diversifié chez leurs parents. Dans un entretien, nous sortons des conventions sociales, nous manions les signifiants de l’Autre, nous faisons usage des semblants au sens où un semblant est ce qui trompe par opposition à l’angoisse qui ne trompe pas. J’utilise assez peu le terme psychanalyse ou psychanalyste sauf si ça fait partie des signifiants du sujet comme dans l’entretien que j’ai relaté. Que vient chercher celui qui s’adresse au cpct ? Une confirmation que l’Autre n’existe pas ? Je suis assez tentée de retenir cette interprétation qui m’évoque que LE psychanalyste n’existe pas (du psychanalyste peut-être, et sans doute pas à chaque fois, dans son cabinet comme au cpct).

Entre nous, est-ce que la langue ne nous joue pas non plus des tours ? Sur la question de la formation par exemple : nous savons que ce terme en psychanalyse est difficile à appréhender car il implique de témoigner d’une mutation subjective pour vérifier cette formation. Mais en dehors de sa propre analyse : la lecture des textes de Freud et de Lacan, l’expérience clinique, la rencontre avec le réel de la clinique, y participent. Nous savons que la formation analytique de chacun est à l’épreuve chaque fois qu’un consultant (équipe A ou équipe B), rencontre quelqu’un. C’est pourquoi, les contrôles sont utiles. Il y a aussi la confrontation avec le réel du groupe qui produit des effets de formation subjectivables. Ce point quand il fait irruption est difficile, mais le savoir qu’on peut en obtenir peut-être gai aussi.

La langue avec travers laquelle nous échangeons est un peu débarrassée des préjugés rencontrés à l’extérieur, mais pas complètement. Ainsi, le problème, souligné plusieurs fois par Hugo Freda et repris dans un Entretien d’actualité avec J.-A. Miller, me semble relever de ces malentendus que crée la langue. Pourquoi, disait-il, quand on veut parler de la passe, on parle du cpct, et quand on parle du cpct, on revient sans cesse sur la passe ! Mon idée est que cette confusion entre ECF et cpct relève d’un malentendu sur ce qu’on entend par formation. Tout le monde veut faire une formation, est-ce que l’expérience du cpct vaut pour formation sur le marché du travail ? Et dans l’ECF ? L’École n’est pas assez articulée au cpct, pas assez proche. Ainsi la constitution d’un 1er séminaire de recherche, d’un 2e, d’un 3e, pour ce que j’en sais, répond à un manque, un manque-à-lire. L’étude des cas est très rigoureuse, mais le cpct ouvre trop peu l’accès au texte, certains le disent. Peut-être que l’ECF pourrait envisager un enseignement plus spécifique pour les jeunes en formation. L’École devrait être le lieu où peut se différencier : une demande de production de savoir qui vise à obtenir de la cure un réel conclusif, et une demande de réinsertion ; ou un appel au sujet supposé savoir, et un appel au savoir-y-faire lacanien.

Promouvoir une pratique qui accueille le réel, qui établit un rapport nouveau à la psychanalyse – un rapport plus direct au pas-tout, à S(A/) – est utile à l’avenir de la psychanalyse, Il s’agirait à mon sens de mieux réarticuler nos signifiants : ECF et UP ; École de la passe et sujet supposé savoir ; cpct et pragmatique. ECF, École, cpct, ne sont pas équivalents, mais il me semble qu’ils se nouent assez bien à ce 4e terme : S(A / ). Liés, ils structurent notre monde analytique qui est un monde de discours, mais aussi de paroles.

Le 7 novembre 2008

ADELA BANDE-ALCANTUD : Un an au CPCT, témoignage

Je termine ma troisième année de l’APA et ma première année de stage au CPCT (Général et CPCT-familles). Je considère que j’ai une chance immense de pouvoir participer à cette expérience de transmission trans-générationnelle1 d’une clinique analytique particulière et inédite, pas sans agalma effectivement. D’où vient-elle ?

Il y a quatre ans j'ai demandé à F.-H. Freda, directeur du CPCT à l’époque, de participer à l'expérience clinique et politique du CPCT. Il m'a alors orientée vers la formation de l'Atelier de psychanalyse appliquée qui faisait partie de la Section clinique. J’ai suivi son indication.

L’impact à deux temps

Le travail de l’Atelier de psychanalyse appliquée a été une découverte pour moi. Douze ans après avoir commencé à suivre les enseignements et les présentations de malades de la Section clinique de Paris-Saint Denis, j’ai découvert l’orientation clinique de l'APA et je l’ai trouvé très différente. La psychanalyse d'orientation lacanienne faisait un pas en avant dans son implication dans la cité. Au même moment, le réel du dernier enseignement de Lacan et le sinthome orientaient la clinique et son élaboration tout à fait autrement. Au sein de l’Atelier, la rencontre entre un désir de transmission décidé chez les intervenants et un désir de formation chez les participants (formant un groupe très hétérogène), a créé un nouveau lien de travail où chacun pouvait évoquer, à travers des constructions de cas, les patients qu’il rencontre en institution. Premier temps.

Le deuxième temps correspond à mon entrée au CPCT en tant que stagiaire. Je me souviens de ma première RIM, et de ma surprise en découvrant cet exercice qui consiste à analyser au plus près la logique et le savoir clinique d’un cas, d’un patient traité suivant les conditions spécifiques du CPCT (nombre maximum de séances limité à l’avance et gratuité du traitement). J'ai une fois de plus réalisé la chance que j'avais de participer à cette expérience si singulière et si commune à la fois. Cela a fait pour moi évènement. J’ai ensuite découvert le groupe clinique où j’ai pu mesurer la pertinence de ce que j’appellerais une clinique du CPCT.

Pour l’Ecole

J’ai toujours pensé que le CPCT fait partie de l’Ecole de Lacan, qu’il existe grâce au soutien et au désir des analystes de l’Ecole de Lacan, mais il est aussi fait pour l’Ecole de Lacan, car cette Ecole se fortifie du fait qu’une grande partie de ses membres et des ses AE participe aussi à la tâche propre du CPCT, celle de "subvertir à chaque fois la demande adressée par l’Autre social"2.

Ce n’est donc pas sans surprise et étonnement que j’ai vu le CPCT mis "sur la sellette" lors de la Conférence institutionnelle de l’Ecole de la Cause freudienne, le 13 septembre3. En effet, je ne voyais pas où était le risque, ni le danger, pour l’Ecole de la Passe. Cette Ecole, qui m’a donné l’envie d’y inscrire ma pratique.

L’émotion passée, je me suis dis que cette disparité de jugement concernant le CPCT (agalma/danger) pouvait être relative à la position de chacun, selon qu’il se trouve au-dedans ou au-dehors. Puis, poursuivant ma réflexion, j’ai pensé à un autre dedans et à un autre dehors, cette fois-ci en référence à l’Ecole. J’ai pris deux cercles de Venn, chacun représentant un ensemble, l’un nommé Ecole, l’autre CPCT et je me suis amusée à donner forme à tous les cas de figure. Il y a des analystes membres de l’Ecole, parfois AE, qui travaillent dans le CPCT ; il y a des analystes de l’Ecole qui ne sont pas au CPCT ; il y a des praticiens de la psychanalyse appliquée inscrits à l’Atelier, en stage au CPCT et qui ne sont pas membres de l’Ecole. Enfin il y a des intervenants au CPCT, indépendants de l’APA et de l’ECF ; des cas exceptionnels en somme. Je laisse de côté les camarades inscrits à l’APA et qui ne sont pas en stage au CPCT mais qui exercent par exemple à Intervalle ou dans d’autres institutions de psychanalyse appliquée appartenant au Réseau d’institutions de psychanalyse appliquée d’orientation lacanienne (RIPA).

Il n’y a pas d’identité entre l’Ecole de la Passe – institution qui s’occupe de la formation du psychanalyste comme produit d’une psychanalyse – et le CPCT – institution de formation en psychanalyse appliquée d’orientation lacanienne – mais il y a des correspondances directes entre l’une et l’autre, ainsi une partie commune entre les deux cercles d’Euler (ECF et CPCT). J’ai l’idée que ce qui donne sa valeur d’agalma au CPCT c’est justement la présence d’analystes de l’ECF ayant fait la passe (F.-H. Freda, ancien directeur du CPCT et membre fondateur, Y. Grasser, D. Laurent, L. Naveau, P. Naveau, M.-H. Roch, E. Solano, R.-P. Vinciguerra.).

Sur le temps qu’on donne au CPCT

Fabien Grasser, directeur du CPCT-Chabrol, m’avait juste demandé de donner 1 heure et demie de mon temps pour recevoir des patients ; s’ajoutent bien sûr la présence obligatoire à la RIM et au groupe clinique. De mon côté, j’ai souhaité participer aussi à l’Unité familles du CPCT où tout un éventail d’actions variées s’offre à l’épreuve de nos interventions analytiques (accueil de jeunes enfants, ateliers de conversation, etc.) afin de mettre de nouveau à l’épreuve la subversion psychanalytique face à la demande de l’Autre social dans laquelle l’enfant a une place si particulière.

Certes il y en a qui travaillent plus de trois heures par semaine au CPCT, mais à chaque fois, cela dépend exclusivement du désir de la personne, rien oblige.

Un effet d’interprétation

Maintenant, après lecture attentive des différents entretiens que vous avez menés, je m’aperçois que derrière ce désir pour le CPCT se niche, discrètement, le désir d’un "Autre social", qui dans sa demande vorace, n’est pas toujours bienveillant vis-à-vis du particulier de la psychanalyse. Aussi, sans nul doute, nous devons le protéger. C’est, me semble-t-il, de votre position d’extime que vous avez été à même de voir et de comprendre les dangers encourus quant à l’autonomie de l’expérience analytique, là où de mon côté, pris dans l’enthousiasme, je n’étais simplement qu’éblouie.

J’attends la conversation du 22 novembre afin que l’on ne jette pas le bébé avec l’eau du bain ; afin que l’on puisse définir clairement la limite du CPCT, face à la voracité de l’Autre social, mais aussi quant à la formation de l’analyste qui, rappelons-le, s’effectue principalement au moyen d’une analyse personnelle, poussée à terme.

Paris, 12 novembre 2008

1. Plusieurs générations d’analystes, ceux appelés en 1998 "la jeunesse de l’Ecole" se rassemblent pour une conversation clinique autour d’un cas (RIM). Les groupes cliniques, au nombre de participants réduit, permettent un contrôle du traitement effectué au CPCT.

2. Troisième point du point 2 de la proposition de conversation pour le 22 novembre 2008 envoyée par Fabien Grasser, Directeur du CPCT-Chabrol.

3. En tant qu’adhérente à la liste de l'ACF-IdF, j'avais demandé à P. Naveau d’y assister

PATRICIA TAGLE-BARTON (NEL) : Réflexions à partir de Lima

Cher Jacques-Alain Miller,

Je vous écris afin de contribuer par mes réflexions à la conversation concernant les CPCTs. Une vignette de Mafalda (célèbre BD de l’humoriste Quino) telle qu’elle reste dans ma mémoire et sans exactitude, m’aidera à commencer. La petite et incisive Mafalda découvre la différence horaire existante entre les deux hémisphères, et s’exclame : "Comment ne pas être sous-développés si les heures nous arrives déjà usées !" En dehors de la question du "développement", ma réflexion partira de la tension entre l’actualité "globale" de l’AMP et la temporalité logique de chaque communauté de travail existant en son sein.

En ce qui concerne NEL-Lima, ce débat nous surprend. C’est le moment pour nous de nous lancer dans la création d’un CPCT dans notre ville. Plus spécifiquement, nous sommes dans un temps de comprendre à partir des cartels de travail consacrés à l’étude des textes épistémiques et cliniques que nous avons recueillis autour des CPCTs. Ayant moi-même récemment assumé le poste de Directrice, je me dois d’assumer la responsabilité de conduire cette expérience, et d’indiquer, avec ceux qui m’accompagnent dans la Direction, les étapes à suivre.

Les récentes Journées de la NEL dans notre ville ont introduit une scansion. C’est dans ce cadre que nous avons été surpris par le présent débat. Nous avons été frappés par le "virage" que vous avez introduit. Pourtant, mes réflexions n’étaient pas loin de la direction que vous prenez, même s’il s’agit de réalités différentes. Au NEL, nous avons étés victimes de la "poussée" au CPCT. Lima se trouvait en retard en comparaison avec les avancés d’autres sièges de la NEL, qui avaient déjà mis en place cette expérience dans leurs villes. A Lima, quelques voix ce sont levés pour critiquer l’ancienne Direction, dénonçant son inaction, sa volonté d’isolement, le manque d’insertion dans "le social", etc.

J’ai assumé la Direction – après la mise au travail des cartels - en plein milieu des rumeurs qui questionnaient à priori une gestion accusée de représenter une ligne "dure", "récalcitrante", "décourageante pour les plus jeunes". La raison ? Notre insistance pour qu’il y ait une évaluation prudente de la formation des analystes et des praticiens de l’Ecole. Nous ne voulions pas nous précipiter vers une expérience qui pourrait facilement glisser à la psychothérapie plate plutôt qu’à une thérapeutique de la psychanalyse bien comprise. Tout aussi bien, j’avais la conviction qu’il était nécessaire de trouver les voies d’insertion de la psychanalyse propre à notre orientation dans la ville, et cela face à l’hégémonie que l’IPA a au Pérou, plus particulièrement à Lima.

Pour diverses raisons, jusqu’à maintenant les analystes de la NEL n’ont pas dans cette ville une insertion en institution. Aucun membre de l’Ecole à Lima ne travaille régulièrement en institution, ni dans des hôpitaux publics ou privés, de telle sorte que la pratique clinique se développe majoritairement dans les cabinets privés. Cela veut-il dire que nous sommes déconnectés du "social" ? Je ne pense pas. Pourtant, dans mon programme de travail, j’ai mis comme objectif prioritaire l’insertion institutionnelle des générations des futurs analystes qui se forment à l’Ecole et à l’Institut (CID). La génération des "jeunes", avec plein d’enthousiasme, a le désir d’initier une pratique clinique, et demande à l’Ecole une sorte "d’aval" et d’engagement. Ils incarnent dans la communauté de travail l’Autre de la demande. Je dois ajouter que, même si leurs parcours son récents, il s’agit des jeunes qui sont sérieusement engagés dans leur expérience, dans leur formation.

Concernant ce point, et en ce moment de mon parcours subjectif, je suis consciente des déviations qu’il y a pu avoir quant au manque de transparence en ce qui touche les offres de formation que, par erreur et inadvertance, nous avons transmises. Je comprends que le débat que vous avez lancé a une incidence sur cet aspect. J’ai la forte intuition que cette situation ne se présente pas uniquement dans notre siège. Cette situation, à laquelle il faut ajouter cette "poussée au CPCT" prise comme consigne, a pu amener à parier précipitamment pour la psychanalyse en extension au sein de la NEL, sans compter avec l’appui de l’intension. Ce pari, à mon sens, n’a pas été sérieusement évalué jusqu’à maintenant. De même, nous pouvons tomber dans le cas de figure contraire : la consigne du "non au CPCT", "attention, danger !" - que je juge comme également contreproductive, puisqu’elle est acritique et anachronique (logique).

Après cet apparent détour, je me permets de postuler le besoin de formaliser la tension entre l’actualité et la temporalité dans nos communautés respectives de travail, dans le cadre de ce que vous avez appelé la tension entre le global et le local ("réfléchir globalement et agir localement", je me souviens que cela a été formulé ainsi.) Nous ne pouvons pas éluder la critique. Elle n’est pas une simple expression d’opinion, mais relève de la nécessité d’examen dans l’application des politiques d’orientation dans le cadre de contextes singuliers. Ceci n’est possible qu’en laissant de côté et de manière honnête, la sotte revendication des "petites différences".

Pour conclure, j’admets que cette petite contribution est un work in progress, et je me sens absolument causée et divisée à partir de son énonciation.

Cordialement.

Trad. française : Carolina Koretzky

URSULA SEIBERT (EOL) : Des limites ?

..."L’illimité est lié justement au caractère limité du traitement lui-même, au sens de l’envers de la limite. Ce qui est essentiel au CPCT, ce n’est pas un traitement court, rapide, gratuit, ce qui est essentiel, c’est la limite du but. C’est aussi la difficulté de la psychanalyse appliquée, puisqu’au fond, dans la psychanalyse pure, la limite est un produit interne. Ce qui fait la limite en psychanalyse c’est l’objet. Je pense en effet que le participant du CPCT manie cette limite à la mesure de ce qu’il a rencontré des limites de la psychanalyse dans sa cure. Cette limite doit par contre être façonnée, au CPCT, dans le temps de consultation. Pourquoi l’illimité est-il l’envers du limité : par dialectique peut-être ?"...

Je voudrais faire un commentaire à partir de cette affirmation de notre collègue Philippe La Sagna : Il y a quelques années à l’EOL, à l’occasion de l’introduction du terme : "Psychanalyse appliquée à la thérapeutique", j’ai soutenu une affirmation lors d’une réunion présidée par Eric Laurent. Assez étonnée de ce qui était en train de se proposer, j’ai affirmé qu’à une époque, en Argentine, se pratiquaient des traitements appelés "thérapies d’objectifs limités". Traitements très critiqués par les psychanalystes, qui comme nous travaillaient, dans des hôpitaux publics. Eric Laurent a répondu à mon intervention en posant une question : "Quand pouvons nous affirmer qu’un traitement n’est pas à objectifs limités ?"

Il s’agissait de la question du traitement et du fait d’atteindre ou non un objectif dans la direction d’une cure.

Il y a eu autour de ces questions, une interminable discussion et des différences entre les psychanalystes et les autorités, lesquelles mettaient en avant l’argument qu’il fallait raccourcir les traitements (ou proposer une amélioration rapide) pour ainsi répondre aux listes d’attente de plus en plus longues. Parce que, tel qu’on le vérifie également en Europe, l’offre d’un dispositif adapté suscite une demande de plus en plus grande.

Et même s’il semble prétentieux de le souligner, nous avons pu sortir de cette difficulté en faisant appel aux élaborations lacaniennes concernant le temps de la séance (la différence entre le temps disponible et la manière de l’utiliser d’une manière efficace), c’est-à-dire, en nous appuyant avec rigueur sur des concepts de la psychanalyse !.

Il fallait sortir de la querelle de la durée de la séance, de la quantité de séances "acceptées" et de la question de la guérison du patient. Chaque séance allait durer selon sa logique interne, ni plus, ni moins. En général, cet outlook avait comme résultat des séances courtes. Ce qui était valable aussi pour la durée du traitement dans l’institution : il n’était jamais trop long.

Nous ne cherchions pas, nous trouvions la propre limite. Peut-être, faudra-il revenir sur les questionnements autour du temps… et de l’espace (qui, je pense, vont ensemble) pour ainsi inventer des dispositifs qui soient à la hauteur de cette époque, et telle que Lacan le conseille… qu’ils échouent de la bonne façon".

Traduit de l’espagnol par Omaïra Meseguer

PUBLIÉ 74 RUE D’ASSAS À PARIS 6è PAR JAM

Entretiens d'actualité n°24

Réactions : Jacqueline Dhéret, Didier Guenardeau,

François Jubert, Philippe La Sagna, Judith Miller, Juan-Carlos Tazedjian

ENTRETIENS D’ACTUALITÉ

24

le vendredi 28 novembre 2008

Nouvelles. On trouvera prochainement sur le site forumpsy.org les interventions de J.A. Miller à Barcelone le 7 novembre dernier, sous le titre : " Sur le désir d’insertion, et autres thèmes ". Le texte est en espagnol. Il a été diffusé sur la liste AMP-UQBAR, les listes espagnole et argentine, et, traduit en portugais, sur la liste brésilienne.

JUAN CARLOS TAZEDJIÁN (ELP) : Du poids asphyxiant du Grand CPCT

Cher Miller :

Je me souviens d'avoir entendu German Garcia dire il y a plus de 20 ans : "La psychanalyse, c'est une forme d'être dans ce monde sans être de ce monde". Je crois que ce qui est arrivé avec le "Grand CPCT" fut une confusion entre le "être dans" – lire : la place du psychanalyste dans le monde – et le "être de" – lire : s'aliéner à la demande de l'Autre social. Nous en étions arrivés à un tel point que les présentations de cas dans les séminaires du CF, journées de l'Ecole, rencontres, conversations, étaient réduites à une exposition systématique et itérative des "réussites thérapeutiques" – quelque chose de pas sérieux pour Lacan qui, dans "Lieu, origine et fin de mon enseignement", disait : "ce qui est vraiment en jeu se trouve à portée de la main, à portée en tout cas du psychanalyste, qui témoigne de cela quand il dit quelque chose de sérieux plutôt que de parler de ses résultats thérapeutiques".

Je dois admettre que je me suis senti poussé par l'atmosphère régnante à rendre compte de ces effets thérapeutiques rapides, en présentant l'année dernière dans le cadre du SCF de Valence, le cas d'une "cure brève et réussie". Cela était si "fermé" – ou au moins c'est ainsi que je l'ai perçu – qu'il me fut nécessaire de conclure mon exposé en le trouant avec une pluie de questions qui transformèrent la présentation en une sorte de charabia. J'ai pris la résolution de ne plus présenter de cas jusqu'à ce que je me sente prêt à le faire en allant au-delà des résultats thérapeutiques, même si cela impliquait d'aller contre la mode actuelle – me situant du côté de l'hétérodoxie.

Vos interventions récentes sur cette question produisent un effet de soulagement, en libérant l'Ecole du poids asphyxiant du Grand CPCT. Encore une fois nous pouvons dire que Miller mit l'air.

Merci beaucoup, et cordiales salutations.

Traduit par Camilo Ramirez

JACQUELINE DHÉRET

Cher Jacques-Alain Miller,

Les entretiens d’actualité dans lesquels vous persévérez nous sont précieux, d’être aussi vifs que dérangeants. C’est ainsi que le questionnaire que vous aviez proposé pour la rencontre de Bordeaux m’avait saisie : pouvions-nous à Lyon y répondre sans attendre, pouvions-nous formuler la politique du cpct-lyon, dire comment nous avancions ? Je voudrais insister ici sur un point qui me tient à cœur. D’emblée, nous avons pensé le projet du cpct-lyon dans son articulation à la Section clinique. C’est la solution que nous avons trouvée pour laisser vide de tout prédicat la question du psychanalyste, dont l’Ecole a la responsabilité. Les praticiens du cpct sont membres du Cercle, formés depuis des années à la Section clinique de Lyon qui soutient dans notre région le transfert sur la psychanalyse appliquée à la thérapeutique. La Conversation clinique, c’est cette convocation à penser les problèmes contemporains au niveau des Sections cliniques à partir de l’enseignement de Lacan et la Conversation que vous nous proposez chaque année à Paris. Du même coup, la question de la gestion du cpct se détachait et relevait de la responsabilité du bureau de la dite association. Ces différenciations peuvent nous retenir d’une politique de l’instantané, caractéristique de l’époque. Dans notre milieu, nous prenons parfois cela pour de l’enthousiasme ou du désir. Merci donc de rétablir une confiance dans la parole qui fait limite, lorsque les S1 se propagent. Ce qui ne va pas, ce n’est pas tant le cpct-Chabrol à qui nous devons beaucoup, que le copier-coller de l’expérience.

Cordialement.

FRANÇOIS JUBERT

Cher M. Miller,

Je viens de lire avec beaucoup d'intérêt le dernier entretien d'actualité que vous nous avez livré (numéro 17).

Mon attention a été retenue par ce qui définirait aujourd'hui les conditions d'entrée à l'Ecole.

Je peux vous témoigner de ce qui m'a retenu jusqu'à présent par rapport aux sollicitations multiples qui m'ont été faites, à commencer par celle de mon analyste, pour entrer à l'Ecole. Je me suis interrogé d'ailleurs sur ces demandes qui sont venues à peu près dans la même période, au début de l'année : quelle était cette politique de recrutement de l'Ecole ? Etait-ce une réponse à l'attaque des TCC et/ou la recherche d'un poids dans les négociations avec le gouvernement sur l'article visant à réglementer la formation et le titre de psychothérapeute ?

Ma réponse a été chaque fois négative : je faisais équivaloir le titre de Membre de l'Ecole à un savoir théorique dont on pouvait rendre compte et déplier dans un but de transmission de la psychanalyse, Membre de l'Ecole revêtant une référence élitiste par rapport au savoir analytique dans sa version théorique. Mais pas seulement. C'était aussi pour moi prendre à sa charge la cause analytique, ce qui ne me semble pas une mince affaire. En ai-je le désir ? Bref, jusqu'à présent, j'ai rejeté ces propositions, mon désir étant, et c'est illustratif du débat actuel, d'intégrer le CPCT de Nantes, ce qui est chose faite depuis mai 2008.

A ce sujet, je m'aperçois au fil des échanges qui ont cours dans les "entretiens", que j'attendais, et j'attends toujours, de ce travail au CPCT un enseignement clinique que ni la Section clinique ni le contrôle ne m'ont permis d'avoir jusqu'à ce jour. Le travail en petit groupe avec des psychanalystes "chevronnés", sur des cas où l'examen séance par séance permet de repérer les éléments structuraux du patient et du problème qui l'amène, les interventions du praticien présentes ou absentes examinées dans ses effets, la discussion riche et dialectique qui l'accompagne, est véritablement passionnante et enseignante. En quelque sorte, une "conversation Uforca" modèle réduit qui revient deux fois par mois mais que je pourrai souhaiter davantage. Il y a là, me semble-t-il, peut-être une carence dans la formation du psychanalyste, en tout cas une attente très grande des praticiens orientés par la psychanalyse sur la clinique.

Pour revenir sur l'objet de mon mail, il y a évidemment une perspective tout autre et beaucoup plus intéressante à recentrer l'entrée à l'Ecole sur le rapport du candidat à l'inconscient. Là, je sais mieux où je suis, peut-être d'ailleurs la proposition de mon analyste de me présenter à l'entrée à l'Ecole était-elle réglée là-dessus, à ce moment de ma cure. Ceci dit, nous sommes évidemment très nombreux à pouvoir témoigner de notre rapport à l'inconscient, comme vous le faisiez remarquer dans l'entretien, et il conviendra de régler les conditions attendues dans ce rapport à l'inconscient pour être admissible à l'Ecole qui ne seront pas non plus les mêmes conditions sans doute que pour la passe.

Veuillez agréer, Cher M. Miller, l'expression de ma respectueuse considération.

Le 14 novembre 2008

DIDIER GUENARDEAU

Jacques-Alain Miller,

J'ai lu, dans les Entretiens, un point minuscule. Il m'a attiré.

Il y est soulevé l'exiguïté des locaux de l'ECF. Déménager dans un autre arrondissement, par exemple dans un loft.

L'Ecole se loge rue Huysmans. Je vous faisais part dans un (premier) courriel précédent que je souhaite devenir psychanalyste.

J'y viens parfois, rue Huysmans, j'écoute. C'est un quartier suffisamment central pour que cela soit possible. Aller à P VIII m'est impossible.

Le local, rue Huysmans, est haussmannien. Il va bien avec l'histoire et le temps et la parole de la psychanalyse. Lorsque j'entre, je suis là d'où la parole provient.

Pour les livres, comme pour les auditeurs, la rue Huysmans deviendrait trop petite...

Pourtant, on ne déménage jamais impunément. Je me rappelle le psychanalyste avec lequel j'ai travaillé : lorsqu'il a déménagé, cela a coïncidé curieusement avec ce qui sera devenu pour moi la fin de ma psychanalyse quelque temps plus tard. En changeant, j'avais changé aussi. Je crois aujourd'hui que j'avais un lieu. C'était "ici". Il fallait peut-être cela pour clore. En quelque sorte, il y a eu lien entre ces deux clôtures.

Dans un loft, la parole n'aurait pas l'architecture, les couches, le temps pour l'accueillir.

En ces temps de questionnements intenses sur les CPCT, j'entends le recentrement que vous opérez. Les deux premiers entretiens que vous avez eus avec FH Freda sont un exemple très rare de rhétorique. J'ai lu le troisième.

Exigu signifie étymologiquement "exactement pesé".

Un loft fut une usine, convertie en habitation. Il existe aussi des lofts imitants, agréables et spacieux, certes, tout construits sur le modèle...

Mais une maison exactement pesée... lorsqu'on la quitte... on n'est plus jamais le même : un temps s'est clos.

Est-ce bien le moment ?

Très à vous.

Le 15 novembre 2008

PHILIPPE LA SAGNA : Questions à propos de l’entretien 17

Rencontrer un analyste au CPCT ou la psychanalyse ?

Le côté spécifique du CPCT serait que le sujet rencontre "un analyste" et pourtant il ne rencontre pas, selon l’entretien 17, "une psychanalyse". Ainsi la psychanalyse appliquée serait le lieu où on rencontre un analyste et pas une analyse, je parle là en accentuant le relief ! J’avais proposé que le CPCT, comme lieu alpha, soit un lieu où l’on rencontre plutôt quelque chose du discours analytique. Il s’agit souvent d’ailleurs, dans les effets obtenus, de purs effets de changement de discours.

J’ai plutôt l’idée que c’est l’analyse en intension qui permet de rencontrer un analyste, au sens de ce dont il s’agit dans ce mot de psychanalyste, le concept en quelque sorte. Le concept est réalisé dans un passage à la limite. "L’analyste" comme maître mot, c’est un "classique" au CPCT, mais aussi hélas, parfois, ailleurs dans le Champ freudien. L’épidémie CPCT ne s’explique pas uniquement par l’effet de certains. Elle est aussi un symptôme dans la psychanalyse, partout dans le monde, que nous commençons à déchiffrer. Est-ce un effet de charité des analystes… Il est vrai aussi que l’argument des ennemis de la psychanalyse est souvent de s’attaquer ad hominem à "l’analyste" ! Est-ce que la persécution dont la psychanalyse appliquée est l’objet dans la santé mentale fait que les praticiens aspirent un peu à prendre un certain "maquis" où ils pensent être plus à l’abri des scientistes et des évaluateurs, c’est une question ? Le CPCT serait (aussi) un mode d’autorisation de "l’analyste".

Panne et mouvement

L’idée de l’Ecole en panne et du CPCT en mouvement est curieuse même si elle est très répandue. L’Ecole a choisi de renforcer sa base d’opérations ces dernières années et de multiplier les opérations extérieures, opérations dont le CPCT faisait partie. Les succès des dernières années de l’ECF, celui des Journées d’études, celui des publications, l’UP, les activités qui se sont multipliés, les combats de l’Ecole, pour Freud et la psychanalyse, tout cela ce n’est pas une panne, ni un faux mouvement. C’était le renforcement de la base qui permet de passer à autre chose : la formation, l’avenir.

La passe n‘est pas "notre" évaluation

Pour la passe, après le creux 2001-2005, il y a eu un renouveau dans les esprits depuis janvier 2007. Buenos Aires en 2008 a frappé les gens sur ce plan, c’était un tournant exceptionnel. La mesure n’en a pas été prise, et la diffusion n’en a pas été assurée suffisamment, dans l’ECF, pourquoi ?

La première matinée de la passe en mars 2008 a réuni 300 personnes au local. La deuxième matinée était fixée par la Commission de la passe pour le 14 septembre ; l’annonce de la Conférence institutionnelle du 13 septembre a amené à déplacer la matinée du 14 septembre pour éviter la confusion.

La thèse de la passe "moment d’évaluation" me semble problématique ; elle est d’ailleurs en contradiction avec le fait que l’Ecole ne soit "pas un lieu de reconnaissance du trajet effectué" par le candidat. La passe c’est un but, celui de dire ce qu’est un analyste et par là ce qu’est une analyse, pas de l’évaluer au sens contemporain de ce terme.

Le problème c’est peut-être le glissement, ces dernières années, vers l’AE super AME, et vers une certaine idéalisation de l’AE, positive, mais qui, par un autre côté, est aussi un facteur inhibant pour les candidats. L’inhibition a aussi ses vertus. Des passeurs il y en a. Qui sont par ailleurs ces passeurs qui ne deviennent jamais passants ?

La clinique à l’ECF

De même la clinique du cas de "psychanalyse appliquée à la psychanalyse" n’a sans doute pas toute la place qu’elle mérite dans l’Ecole.

Il manque peut-être aussi, pour faire exister cette clinique autrement, des soirées et des colloques de psychanalyse, restreints, dans l’ECF, avec discussion effective des cas d’analyse. Cette discussion n’existe pas vraiment de cette façon dans nos Journées d’études ; j’ai encore un bon souvenir des Colloques de Nantes et de Nice à ce niveau.

L’idée de Jacques-Alain Miller de faire valoir à nouveau les formations de l’inconscient me semble cruciale. C’est peut-être l inconscient qui n’est plus reçu aujourd’hui, de la même façon. Son "ouverture" dépend aussi de nous. L’inconscient de Freud, de Lacan et celui, le plus réel, qui réveille !

Entrée dans la pratique et entrée dans l’Ecole

Pour la passe, le problème, comme je l’avais dit en janvier 2007 lors du séminaire de réflexion, me semble aussi celui de l’entrée dans la pratique. Les analysants qui le veulent se mettent dans la position d’analystes praticiens, de fait, au bout de 7 à 15 ans d’analyse, en moyenne. C’est là aussi le début des analyses de contrôle. La demande de passe survient (plutôt rarement il est vrai) 5 à 15 ans plus tard. Ceci correspond au moment où les analystes terminent eux-mêmes, parfois, des cures : la leur, mais aussi souvent celles de certains de leurs patients.

Il y a là deux moments, deux cycles peut-être, deux versions en effet de l’analyste : l’instant de voir de l’entrée dans la pratique, qui comporte toujours une élision, et le moment de conclure, que constitue la passe.

Pourquoi ne pas recevoir dans un jury les personnes qui entrent dans la pratique, sans attendre, et mettre ça en question avec eux ? Cela aurait un sens de constituer ou non cet instant de voir. Et cela aurait aussi un sens pour les associations de praticiens. Il ne s’agit pas d’agréer ces personnes, mais de les connaître, de les questionner, de les orienter, de suivre leur formation, de scander un cycle. Lacan dans sa note adjointe (AE p. 234) notait que ceux qui entreprennent une psychanalyse didactique "le font de leur chef et de leur choix". Il ajoute (idem AE) : "Mais l’admission à l’Ecole leur impose la condition qu’on sache qu’ils en ont engagé l’entreprise, où et quand." Autrement cela ressort du seul consentement privé de l’analyste du sujet. Lacan soulignait aussi que "La psychanalyse est constituée comme didactique par le vouloir du sujet" et il ajoutait que l’analyste est là pour le contester !

Vouloir la didactique

Commencer à pratiquer, fût-ce dans la psychanalyse la plus appliquée, c’est indéniablement vouloir, de fait, situer son analyse comme didactique. L’Ecole a à en savoir quelque chose.

Pour entrer dans l’Ecole comme membre il faudrait ajouter ensuite, au temps deux, comme le propose Jacques-Alain Miller, une sélection sur titres et travaux et la passe. Les travaux cliniques personnels ne peuvent exister avant que le sujet pratique l’analyse. Cela voudrait dire sans doute qu’il faudrait se pencher sur les degrés (gradus) existant dans notre passe et notre Parnasse (théorie des cycles ?). Quelle serait alors la forme du "suivi" des candidats par l’ECF (de leur formation) entre leur témoignage de départ et l’entrée par la passe dans l’ECF ? L’entrée dans l’Ecole n’est plus alors une entrée par la pratique. Y a-t-il là le risque de mettre du tiers/ECF dans les cures ? C’est à débattre, mais, à mon avis, ce tiers y est déjà comme effet de groupe.

Tout cela demande aussi de repenser le contrôle, le rôle de l’AME (censé aussi être un passant en puissance et qui pourrait aujourd’hui être plus jeune et en plus grand nombre).

Cela demande peut-être aussi de faire des groupes d’élaboration de cas à l’ECF qui ne se limitent pas à la clinique du CPCT, mais qui traitent des cures analytiques effectives, dans l’Ecole, de vrais cartels de recherches cliniques en somme.

JUDITH MILLER

Les entretiens d’actualité concernent chacun. La conversation n’invite jamais à dire n’importe quoi. Sachons ce que parler veut dire.

Je lis pourtant dans la 19e livraison Monsieur Didier Kuntz, qui félicite Jacques-Alain Miller pour dégoiser avec plus de veulerie sur tous les CPCT ou celui de Bordeaux (?). Il dit par exemple : "on vise un profit pour la psychanalyse au prix d'un relâchement éthique. Le sujet devient juste l'occasion de faire savoir que la psychanalyse existe, il ne sert qu'à sa représentation. … on se met à courir derrière le plus-de-jouir de la subvention. Cela rapporte à l'Etat une tranquillité certaine du côté des psychanalystes, les subventionnés du moins – et les autres, on les oublie. C'est à cela que, très salutairement, vous avez réagi, je crois".

Il ne s’agit pas même de cynisme dans ces propos, tel qu’Antoni Vicens situe cette position où le sujet se soumet à l’Autre dont il croit pouvoir se passer par besoin de monstration. Mais d’un grégarisme, aussi grossier que redoutable ; à s’en faire remarquer et pour en être bien vu, il n’en est pas moins à la place de ce qu’il dénonce, l’ivresse du pouvoir et la suite en y assignant son destinataire.

Sans doute la publication d’un tel message vise-t-elle à avertir que de telles interprétations de notre actualité ont cours, aussi pernicieuses et éhontées soient-elles.

Il faut savoir en effet de quelle lie l’analyse ne prémunit pas, l’histoire du mouvement analytique me l’avait appris. L’actualité me montre que rien ne change. Faut-il dire que c’est rassurant pour moi ? certes pas, mais à prendre en compte pour savoir de quel bois nous choisissons de nous chauffer.

PUBLIÉ 74 RUE D’ASSAS À PARIS 6è PAR JAM

Sur le désir d'insertion, Jacques-Alain Miller

Jacques-Alain Miller
Sur le désir d’insertion, et autres thèmes
Interventions à Barcelone, le 7 novembre 2008
(en espagnol)


Jacques-Alain Miller : Sobre el deseo de inserción,

y otros temas

ENTREVISTAS DE ACTUALIDAD

numero especial

Intervenciones en Barcelona, 7 de Noviembre de 2008

I

La historia sobre el pan[1] me hace recordar un cuento de Ray Bradbury, seguramente Vicente Palomera lo conoce. Es una historia proyectada en el futuro. Todo el mundo calcula con computadores, con máquinas, y ya se ha olvidado totalmente la antigua manera de hacerlo. Y en algún momento, en un Ministerio de Defensa de EEUU, en el Pentágono o algo así, alguien viene y dice que se ha hecho un descubrimiento extraordinario, algo que se puede calcular con un lápiz y un papel y que es algo que no cuesta nada. Es así como lo recuerdo.

Es la misma cosa que la historia del pan, el sentimiento de que hemos perdido un saber fundamental y antiguo sacrificándolo al automatismo, a la máquina, a la técnica. Es algo que tiene un eco para nosotros porque no podemos desconocer que estamos haciendo la experiencia de una cierta estandarización que hacemos nosotros mismos de nuestra manera de hacer.

En los primeros tiempos, los analistas parecían brujos inquietantes, que sabían cómo hacerlo. Después eso se fue ampliando, y llegó Lacan que dio claves fundamentales. y todos sus colegas dijeron, “no hay que decir esto al gran publico, tiene que quedar entre nosotros”. Él vendía la mercancía a bajo precio, o sin precio alguno, a todo el mundo que venía a su Seminario. Y después hemos venido nosotros a poner esto en orden. En nuestro momento, el mío, el de mi generación y el de otros aquí que están en la misma, hemos puesto en orden los instrumentos que nos había dado Lacan. Lo que había inventado poco a poco, lo hemos visto en su conjunto, hemos puesto los instrumentos en su lugar tal como se ponen para el bricolage en el panel de la pared - la Black & Decker, el martillo... Ahora estamos en otro momento histórico, donde pasamos a la estandarización de masas. Y los Cpct son el vehículo de la estandarización de masas y del uso rápido de sus instrumentos. Debemos reflexionar sobre lo que pasa.

El tema “inserción / des-inserción” está hecho para eso. Me parece que podemos decir que es un deseo fundamental en el ser hablante el deseo de inserción. El ser hablante desea insertarse. Lo que Lacan llamó el discurso del Otro, que inmediatamente pasó al psicoanálisis en términos de un esquema de comunicación, de intercambios de mensaje, de inversión de mensaje, dice que lo social en eso es radical, es la raíz. Es el sentido del título de Freud de “Psicología de las masas y análisis del yo”, donde dice ya que lo social está constituido en la relación analítica. Y sabemos que cuando hay un sujeto con un deseo de des-inserción, es algo que puede ir hasta el suicidio social y el suicidio vital.

Hay dos matices de la inserción que efectivamente la frase de Lacan subrayada por Hebe en el seminario XVII y retomada por Bassols nos hace ver[2]. Es la inserción como identificación, es decir el sujeto se identifica al S1 y en cierta manera muere en esta identificación, se hace representar por un significante rígido y es como morir para ser representado, en el mismo sentido de “la palabra es la muerte de la cosa”. Es la identificación y del otro lado hay una nueva vida cuando viene el S2 como un renacimiento del sujeto y la producción del objeto. En mi opinión, en esta frase Lacan distingue alienación y separación.

La alienación es la identificación. Del otro lado se necesita el S2, el significante del saber para hacer renacer al sujeto. Y con eso se desprende del cuerpo el famoso objeto pequeño a. En el texto “Posición del inconsciente,” Lacan dice, comentando la palabra “separación”, que el sujeto desea ser “pars”, ser parte, y que el deseo de ser parte, de pertenecer a un todo, tiene que ver con el objeto.

Constatamos en la clínica lo importante que es para cada uno ser parte, pertenecer. Cuando el sujeto pierde su pertenencia a un grupo, a una asociación, a una jerarquía, a un puesto de trabajo, a una empresa, aunque se queje de sus condiciones laborales tiene regularmente efectos patológicos, porque va mucho mas allá de perder el dinero, el estatuto, el prestigio. Toca a su ser, toca al objeto pequeño a.

También lo vemos en otros fenómenos. Cuando en París hay jóvenes que me describen el placer que tenían en el Cpct, que es como una familia, un grupo tan confortable. Puedo entender el placer, pero es el problema. Porque en el psicoanálisis, cada uno esta confrontado a su soledad, a su falta, a su miseria, y eso produce una llamada al confort grupal. Y es toda una cuestión saber si debemos poner en marcha aparatos de contra-soledad, de pertenencia. Lacan pensaba que no.

La École freudienne de Paris era un lugar que no funcionaba, que no tenía un adentro, la asamblea general duraba 15 minutos anuales, no se entendía nada del discurso del secretario, no había ningún documento escrito, y Lacan decía - ¿hay preguntas? Generalmente había uno o dos de algunos sujetos histéricos que querían recibir un golpe en la cabeza por parte de Lacan, y se terminaba la cosa, y no había lugar para quejas. Fue una buena época para el psicoanálisis. Fue la época en la que Lacan construía su enseñanza, y había mucha gente que trabajaba a Freud. Estaban en instituciones como hoy, pero se consideraba que la cuestión de las instituciones no debía ser planteada dentro de la Escuela. Dentro de las instituciones, había el régimen del amo, y cuando uno venía a la Escuela, podía respirar otro aire, y que esto era más importante - formarse como analista, respirar la atmósfera del discurso analítico. Con esto la gente podía cuidarse en las instituciones.

Nosotros lo hemos hecho diferente, los tiempos son distintos, pero si con el pretexto de difundir el psicoanálisis afuera hacemos entrar la atmósfera de afuera adentro, si vamos nosotros mismos a creer lo que decimos afuera, - que somos eficaces, que somos los profesionales más excelentes, que obtenemos efectos terapéuticos tan rápidos que nosotros mismos nos quedamos asombrados de nosotros mismos -, es decir si empezamos con un narcisismo tan desbordante, seguiremos diciendo que somos psicoanalistas, pero quizás nos estamos transformando, como en la obra de Ionesco, El rinoceronte. Bien, es un peligro. Pienso que hay que considerarlo.

En el tema de la des-inserción, hay qué pensar el tema del lugar, la place, el sitio. En su conferencia sobre su enseñanza, Lacan empieza sobre el concepto de sitio y el sitio se extiende hasta el concepto de espacio, de un espacio métrico. Es muy importante para cada uno su sitio en relación al sitio de los demás. Sabemos los trastornos que produce un cambio espacial de otros para un sujeto, cuando ve a la gente de su propia generación que avanzan más rápido en una jerarquía. Todo esto es algo cotidiano, pero tiene un sentido fundamental.

También, en el tema de la des-inserción para el encuentro de Barcelona de julio, hay que considerar el tema de la des-inserción del analista - a saber, en qué medida el analista debe insertarse o des-insertarse del discurso del Otro, y en qué sentido. La posición de Lacan nunca fue favorable a la ilusión de extraterritorialidad pero a la vez hablaba de la Escuela como de una base de operaciones contra el malestar de la cultura, es decir a contracorriente de los valores predominantes, cómo mantener esto sin ser aplastados. Hay que elaborar una postura ya que la presión social del psicoanálisis es mucho más fuerte ahora que antes.

Antes, los políticos no se preocupaban por el psicoanálisis, sino por su familia o por sus propios trastornos personales, pero no como un problema político. Ahora, el psi es un problema político, administrativo y social. Estamos en una situación histórica inédita que hace mas difícil pensar en nuestra posición. Estamos en cierto modo exiliados del interior, y estamos condenados a cierta astucia con los poderes.

Ellos se llaman o nos proponen que los llamemos los “partenaires”. Y nosotros consideramos que son agentes del discursos del amo, pero no podemos llamarles asi cuando estamos discutiendo con ellos. Pero entre nosotros, es tanto más importante recordarlo.

Se pasa muy rápidamente de difundir afuera el psicoanálisis al hecho de abrir las puertas de nuestras bases de operaciones para hacer entrar a los agentes del discurso del amo. Y cuando esto se produce, en mi opinión no va. Son contactos para afuera, no hay que traer esto adentro.

La cuestión es cómo elaborar la extimidad analítica en la sociedad contemporánea. Creo que no es imposible elaborarlo, que hay algunos criterios que permiten decir esto va y esto no va. Creo que debe ser una elaboración provocada y con muchos aportes. No hay una solución en los libros, no hay una formula en Freud y Lacan, porque no fue el problema de su época. Es un problema de nuestra época, reciente. No era un problema en 1980, es un problema en 2008. Es apasionante, y se necesita esa valentía de la cual ha testimoniado Mercedes de Francisco. Debemos hacer algo como tomas de posición fuertes en nuestros debates, no dejar las cosas debajo de la mesa.

Estamos al inicio del siglo, y al inicio de esta cuestión. No es tan antigua la cuestión sociopolítica para nosotros, es una cosa de este siglo. Hubo un giro al inicio de este siglo con Europa, con el deseo de regularizar el título de psicoterapeuta, es algo reciente. Estamos al inicio de una larga trayectoria y hay libertad entre nosotros para discutir con fuerza de manera que obtengamos una Aufhebung de nuestra posición.

En mi opinión es de esto de lo que se trata en Pipol 4: se trata del psicoanálisis aplicado pero del psicoanálisis aplicado al psicoanálisis mismo.

II

Voy a hablar francamente, me parece necesario para que sea un debate productivo.

Mi intervención es responsable de cierto efecto depresivo. Lo asumo con gusto. Porque percibí que había una “Cpct-manía” en el Campo Freudiano.

Es como si todo el Campo Freudiano se fuera a reconfigurar a partir del concepto, de la ideología y de la práctica del Cpct. Descubrir esto ha sido para mí asombroso, lo confieso. No lo había percibido, o quizás percibi algunas cosas, pero no lo quería saber - hasta el punto de producir algunos olvidos sintomáticos, de los que he dicho que iba a compartir el análisis. Pero no lo puedo hacer ahora, no será agradable para otros.

Creo, asumo, que si no hubiera intervenido en las ultimas Jornadas de la Ecole de la Cause, cosa que hice por una cadena de efectos contingentes, si no hubiera empezado las Entrevistas de actualidad y si no hubiera venido a Barcelona, la cosa habría sido muy distinta, habría continuado la “Cpct-mania”. No debemos quedarrnos en la “Cpct-depresión”, sino abandonar la “Cpct-manía” para salvar lo mejor de la experiencia.

En mi idea, en mi deseo del Cpct, tal como lo nombré yo, poéticamente, C.p.c.t., se trataba de una experiencia limitada. Porque era peligrosa, porque era una experiencia con un veneno. La había concebido como una ingestión de veneno a dosis homeopáticas. Y gustó tanto este veneno que ahora son botellas y botellas que se beben en todo el Campo Freudiano y en todo el mundo. Es un veneno excelente, un veneno de primera.

La experiencia Cpct sigue desde hace cinco o seis años en París, desde hace cuatro años en Barcelona, desde hace dos años en otras partes. ¿Qué es esto en comparación del siglo XXI? Son los primeros pasos del bebé, estamos preparando el futuro. Es una experiencia en todas partes, es más amplia. Si la hubiéramos llevado a cabo a pequeña escala, hubiéramos podido percibir algunos peligros, elaborar respuestas. Pero esto es lo ideal, no se realizó así - y seguramente por razones fundamentales. Era como un esbozo de reconciliación del discurso analitico con la sociedad, con el discurso del amo. El resultado fue fulgurante. Se puede decir que ese desborde forma parte de la experiencia. Es una experiencia que debia desbordarse a sí misma.

Borderías se ha referido, con razón, a lo que dice Lacan en “La dirección de la cura...”: con la oferta hemos creado la demanda. Bien, pero ¿qué hay después? El psicoanalista con su oferta crea la demanda del sujeto, pero no responde a esta demanda que ha creado. Toda la cuestión es no responder a la demanda creada, a la demanda del Otro social. Yo considero simplemente que si el analista ya no responde a la demanda del sujeto, tampoco responde a la demanda del Otro social, debe responder al lado de esta demanda. Si responde a la demanda del Otro social, esto produce los Cpct tal como vemos crecer, y crecer sin límites. Ahora, por el momento, son los miembros y los que están en formación en la Escuela que trabajan en los Cpct, pero en poco tiempo vamos a deber formar rápidamente gente para trabajar en los Cpct para responder a la demanda que crece. Esta es la lógica.

Me parece más razonnable rechazar la demanda del Otro social, o interpretarla, pero no responder a ella directamente. Si no, no es psicoanálisis aplicado a la terapéutica, es asistencia social de orientación lacaniana. Y como la asistencia social de orientación lacaniana no existe, es asistencia social de pretensión lacaniana.

Pienso que lo que es urgente es no crecer más, parar con ese crecimiento, que es totalmente oral. No sé si es devorar al Otro, o si es el Otro el que nos devora. Parece lo mismo: estamos devorando lo que él da, buscamos subvenciones del seno del Otro, y a la vez somos devorados por él, como lo describió Esthela Solano en un momento de la conferencia institucional de la Ecole de la Cause freudienne. Ella fué implicada en esta experiencia desde el inicio, y dijo que algo en el Cpct de Paris nos desborda y nos devora. No estamos aun en este tiempo en España, pero todos los signos son que vamos hacia esto, si no hay un momento de reflexión.

Lo que digo no tiene nada de final, estoy abierto porque no conozco suficientemente aun la situación en su detalle, espero conocerla con las cifras. Me equivoqué ya en el pasado, posiblemente me esté equivocando ahora sobre algunos puntos, y me equivocaré en el futuro. No tengo un orgullo que me impida decirlo. Quiero una discusión, pero no puedo esconder el sentimiento de urgencia que me anima;

Esto ha sido no solamente una experiencia sobre lo social, ha sido una experiencia sobre el deseo del analista.

Es una experiencia sobre si el deseo del analista es suficientemente fuerte en nosotros como para percibir que hay cosas que no se hacen en una Escuela de psicoanálisis o en sus alrededores. Y considero que el deseo del analista tiene cierta debilidad dentro de nosotros.

No puedo soportar este lenguaje de “partenaire” entre nosotros. Después de años de la enseñanza de Lacan, con lo que nos dice del discurso del amo, estamos con los ayuntamientos, con los consejos regionales, con los ministros, y decimos gracias todo el tiempo. Debemos defendernos, esto es una cosa, pero entre nosotros ahora, instalar el discurso del amo, después de tantos años... es algo que no entiendo, y que ustedes me van a ayudar a entender.

Quizás es un fenómeno generacional: soy de una antigua generación que ha sido izquierdista, y ahora el mundo es pensado de otra manera. Estoy dispuesto a pensarlo, estoy dispuesto a aceptarlo. Pero el problema esta ahí.

III

Hilario Cid:

La intervención de Jacques-Alain Miller me parece completamente pertinente, pero de hecho es algo que quizás no nos hemos podido expresar con suficiente claridad pero que ya venimos tratando e intentando ver aquí en España. Por eso yo hablaba que tanto Elvira como Manuel Fernández Blanco como Xavier Esqué, lo primero que me dijeron cuando se abrió el Cpct-Malaga fue: “cuidado con el éxito, hay que parar una demanda feroz, hay que pararla”, y de hecho ha sido nuestro objetivo en ese momento. Ellos que tenían una experiencia de un par de años ya, fue lo primero que nos dijeron y esa ha sido nuestra máxima en el CPCT de Málaga porque veíamos que nos desbordaba.

Elvira Guilañá:

En la experiencia inicial del Cpct-Barcelona se sabía qué política se quería seguir y era que el Cpct se centrara en la cuestión de lo que sería un laboratorio clínico, un lugar donde se pudiera investigar, colaborar con la formación de los jóvenes y formalizar lo que aprendemos de la clínica. El texto que Jacques-Alain Miller citaba de Lacan, de lo que el psicoanálisis enseña y cómo enseñarlo, de los lugares, es uno de los temas que elegí para la ponencia del Cpct para Pipol 3 y que fuimos trabajando. ¿Como transmitir al Otro de la Escuela y al Otro de lo social la experiencia clínica del Cpct? Cuando escucha el Otro de la Escuela, siempre hemos destacado estos dos puntos, cuando escucha el Otro de la Escuela nos pone a trabajar para transmitir esta formalización. ¿Cómo construir una base psiconalítica de síntomas... cómo colabora el Cpct en la formación de los jóvenes? El problema no era ni creo que se haya situado nunca en la cuestión del crecimiento, al contrario, hemos sido muy prudentes. Entre las permutaciones que han habido en el Cpct-Barcelona, renovamos anualmente nuestro pacto de trabajo en todos los Cpct de la red de la ELP, cada año alguien puede decir “tengo deseo, interés en otra cuestión”. De hecho, hay colegas que lo han planteado así y otros han ido entrando. La proporción de equipo es una proporción de equipo limitada y cada año se van uno o dos colegas que quieren orientarse en otras cuestiones y entran uno o dos...

Jacques-Alain Miller:… sobre cuarenta... es una permutación muy limitada.

Elvira Guilañá : Si, sobre cuarenta. El único crecimiento importante es la incorporación de los participantes del I Stage. Al incorporarse los stages siempre hay un crecimiento que tendremos que tener en cuenta. Es así, es un punto el del crecimiento, tal como usted ha destacado que es importante tener en cuenta, que hay que tener en cuenta y elaborarlo.

Xavier Esqué: Si me parece muy importante y nos viene muy bien poder parar para reflexionar hacia donde van los Cpct. Hay que hacer un poco de historia, al menos aquí en España y es que los Cpct ya de entrada tuvieron una articulación, un acuerdo importante con el discurso del amo, a partir del acuerdo que hubo con el Ministerio y la Secretaria de Asuntos Sociales. Me parece que no se trata en de este momento, de tratar de ver a favor o en contra sino que es una experiencia que pusimos en marcha, que apostamos fuerte por ella y que ahora a partir del cuestionamiento podemos encontrar una respuesta que no estaba al inicio, que no estaba al inicio cuando nos pusimos en marcha. Pero esto nos viene muy bien, diría que aquí no estamos en un punto de manía, empezaba, sí, pero que es una manía que según lo entiendo yo tiene que ver con la misma lógica interna de este aparato que lleva hacia la manía, que lleva al crecimiento. Hay algo que más allá de cada Cpct lleva hacia ahí y entonces, sí, es el momento de parar, analizar y ver cómo resolver este tema de la búsqueda de las subvenciones.

Jacques-Alain Miller: Parece que no se ha tenido en cuenta un hecho esencial. Lo hacemos gratuito, y después decimos - ¡maravilla, todo el mundo viene! Lo hacemos gratuito, es decir que era una cosa que había que hacer en poca cantidad. Que sea gratuito ¿quiere decir que es caridad o bondad por nuestra parte? ¿Es algo admirable que después venga la muchedumbre a comer la sopa popular del psicoanálisis?

Ayer recibí un mensaje personal, y pedí a la persona autorización para ponerlo en mis Entrevistas de actualidad. Un colega miembro de una ACF dice que lo esencial de toda esta cuestión es la falta - falta de dinero, falta de lugar de escucha... Primer punto - el principio de todo esto es la miseria. Segundo -todos los actores del sistema mienten, el psicoanalista también cuando dice al sujeto que no tiene que pagar nada para acceder a la verdad de su síntoma. Es una mentira, dice, y dice que con esta mentira mantenemos a los sujetos en la miseria. Lo leí ayer a las ocho de la noche y me tocó, porque va mas allá que yo mismo en la lectura analítica de lo que hacemos. Dice que la caza de las subvenciones es el acting out de esta gratuidad, es el plus de goce. No entiendo totalmente su argumento, pero siento que ha captado algo, que ha hecho una lectura analítica de estos fenómenos raros de la experiencia de masas.

Yo pensaba que era posible como experiencia reducida, vi inmediatamente, el primer día, que el Cpct-Chabrol hacía una llamada mucho mas amplia. Lo dejé ir. Pienso ahora que estaba condenado a este crecimiento, En el principio mismo de la máquina, no existía una frontera. Pienso que con la gratuidad debíamos poner una barrera. Usualmente es el dinero el que pone esa barrera, pero con la gratuidad no hay limite.

Necesariamente va a darse totalmente contra el muro, no soy yo quién está ahí para pararlo. Es algo que terminaría en el muro, como terminaron otras experiencias de crecimiento excesivo. Y pienso que hubo esta experiencia en Barcelona, si alguno se recuerda. Para mí, desde este texto, la gratuidad está también en cuestión.

Andres Borderias:

Preparando mi intervención de hoy, si tuviera que introducir una pregunta, una cuestión fundamental del debate, para mí es si hay posibilidad de una dialéctica con el discurso del amo. Y son las condiciones de limitación las que hacen posible creer que hay una política del síntoma que nos permita mantener una cierta dialéctica. Porque si esta es la cuestión, entonces se trata de definir las cuestiones de limitación en su justo término, el crecimiento del equipo, el número de pacientes que se atienden. La limitación si no es por la vía del dinero es por la vía del tiempo que se atiende, es por la definición del ciclo, es por al definición de los efectos obtenidos. Me parece que hay una posibilidad de mantener esta experiencia si respetamos las condiciones de limitación, las subvenciones que aceptamos y las que rechazamos, el tipo de interlocutores que nos queremos encontrar y los que no, mantener una evaluación permanente sobre este punto.

Hebe Tizio:

Celebro la posibilidad de esta discusión porque me estaba acordando de lo que había como previos a la creación del Cpct y era justamente una discusión sobre cómo generar transferencias y había pensado algo en relación al Cpct como una forma justamente de no de responder al discurso del amo sino de creación de transferencias. Es decir, qué gente podía por esta vía entrar en análisis y creo que lo que la experiencia demuestra es que esto no sucede, con lo cual me parece que el tema de la discusión centrado en el Cpct tiene toda su importancia si lo remitimos al tema de la formación del analista, y a algo que acaba de decir Miller que es realmente sobre el tema del deseo del analista. Porque si originariamente la preocupación nuestra era cómo generar transferencias para asegurar el recambio generacional y el futuro del psicoanálisis, me parece que la cuestión del Cpct, en todo caso, tiene una evidencia sintomática, pero que la discusión de fondo tiene que ver con este punto, la formación de los analistas y el deseo del analista que es un tema del que hemos dejado de hablar. Hemos tenido como una suerte de invasión de psicoanálisis aplicado y estas cuestiones han quedado de lado. Creo que si retomamos verdaderamente estas cuestiones de fondo automáticamente se reubicará lo del Cpct.

Laura Canedo:

Debo decir que cuando leo “psicoanálisis aplicado a la terapéutica” no me resulta muy cómodo. Yo tengo el sentido de que no se trata de psicoanálisis aplicado a la terapéutica sino que se trata más bien, ya que tiene que ver con la Escuela, de la formación del analista y en tanto tal de la aplicación del psicoanálisis puro pero a la clínica. Y tengo la sensación de que cuando estamos con toda la cuestión de la terapéutica estamos con esta cuestión de la demanda del Otro social y que hay que volver un poco a la cuestión más de la clínica... Tengo la sensación de que a veces los Grupos de Investigación, los trabajos llevan a una lectura desde la terapéutica y no me parece interesante.

Pilar Gonzalez:

Quiero retomar lo que me parece muy interesante que ha dicho Jacques-Alain sobre el deseo del analista. Un joven con fracaso escolar me dijo que odiaba a los maestros porque nos quieren ordenar para incluirnos en un mundo profundamente desordenado. Yo pienso que la demanda del Otro social es justamente que insertemos a los desinsertados. Parece que el semblante que en este momento tiene el Cpct es un semblante del Otro del amor, de la caridad y en cierto modo del engaño. Para el Otro social que hace esta demanda de que insertemos a los desinsertados, quizás el riesgo sería que nos coloquen en el lugar de la religión, algo que cumple una función de insertar a estos desinsertados por esa via. En realidad, lo que ha dicho Bassols de desinsertar al sujeto de su forma de goce para conectarlo al Otro del discurso, evidentemente es nuestro objetivo. Todos sabemos en un análisis el recorrido que lleva eso y por tanto tal como se plantea en el Cpct quizás tengamos que ser muy humildes de lo que podemos conseguir, pero toda esta discusión me lleva a la pregunta sobre qué podríamos cambiar para orientarnos por el deseo del analista, porque pienso que tal como nos presentamos y tal como el Otro social recibe nuestra respuesta hay bastantes dificultades.

Jacques-Alain Miller:

Estoy esperando las cifras en Francia. Ahora tengo cifras de julio de 2004 y julio de 2008, es una multiplicación por tres o cuatro veces más. Iba a terminar por constatar que no teníamos suficientes obreros en el Cpct y que debíamos formar ahora rápidamente gente que pudieran trabajar en el Cpct porque teníamos los medios para hacerlo. Me hizo pensar en la construcción de las pirámides, como en la película de Cecil B de Mille, “Los diez mandamientos”.

Y se trabaja sobre que? Sobre temas decididos por el gobierno Ahora los gobiernos se interesan por la obesidad. ¿Cuáles son los proyectos? Crear un Cpct-obesidad en Francia. Estamos por seguir los pasos del discurso del amo, decimos a los poderes que tenemos a gente para eso. Y ahora se crea un Grupo de Investigación en la Escuela sobre la obesidad.

¿En qué momento nuestra obesidad nos va a convencer de hacer un tratamiento? Lo interesante - no he terminado de entenderlo - es la dominación de la pulsión oral en este cuestión del Cpct. Quizás hay que pasar del período histérico del Cpct al período obsesivo. Un poco de pulsión anal quizás. Quizás seria necesaria una dialéctica entre la pulsión oral y la pulsión anal.

Transcripción: Elvira Guilañá.

Establecimiento del texto: Miquel Bassols



[1] Se refiere a una intervención previa de Mercedes de Francisco: “Como planteaba Richard Sennett en La Corrosión del Carácter, ya no encontramos a los panaderos griegos que sabían hacer el pan sino a los que saben apretar el botón de la máquina que hace el pan. En cualquiera de estos ámbitos, los sujetos se ven degradados en su relación con el saber y con su tarea.”

[2] La frase citada y comentada está en el Seminario XVII, Ed. Paidos, p. 97: En el discurso del amo “el sujeto se encuentra vinculado, con todas las ilusiones que esto comporta, con el significante amo, mientras que la inserción en el goce se debe al saber.”