dimanche 14 décembre 2008

Entretiens d'actualité n°31

J.-P. Deffieux, F.-H. Freda :

À propos de l’École de la Cause freudienne

Deborah Rabinovich : Après le CPCT

ENTRETIENS D’ACTUALITÉ

31

le jeudi 11 décembre 2008 (2)

diffusé sur ecf-messager & archivé sur forumpsy.org

JEAN-PIERRE DEFFIEUX : Aux responsables des groupes de recherche

Cher(e)s collègues,

J’ai beaucoup réfléchi dans ces derniers mois, à la lumière des divers entretiens d’ecf-messager, à notre expérience de groupes de recherche dans l’Ecole.

La politique de l’Ecole change, et l’esprit dans lequel nous avions mis en place cette expérience ne convient plus à une école de psychanalyse qui concentre ses efforts vers ce qui est le cœur de sa fonction : La formation du psychanalyste et l’expérience de la cure.

C’est pourquoi j’ai décidé, avec l’assentiment du Bureau de l’ECF, d’arrêter cette expérience au 31 décembre 2008.

Ceux qui sont au travail d’une recherche sur un des thèmes de ces groupes auront à trouver une autre voie, et elles ne manquent pas.

Je vous remercie tous pour votre collaboration si aimable et si efficace. Je vous laisse le soin de prévenir les participants de vos groupes en leur précisant bien les raisons de cet arrêt.

Bien cordialement à tous.

Cette lettre a été adressée lundi aux intéressés.

FRANCISCO-HUGO FREDA : Point de vue

Lors de son cours "Des choses de finesse en psychanalyse" du 26 novembre 2008, Jacques-Alain Miller conclue de la manière suivante : "Ces formations continuent de fleurir tant qu’on est un être parlant, et l’analyste, qu’il soit l’analyste nommé, l’analyste auto-institué, l’analyste expérimenté ou l’analyste débutant, n’est en aucun cas exonéré de tenter, comme Freud nous en donne l’exemple, d’éclairer – je ne dis pas d’aimer – son rapport à l’inconscient".

Cette conclusion de son cours concerne tous les psychanalystes. Il prend comme exemple Freud qui a fait de l’analyse de ses propres rêves, et d’autres formations de l’inconscient, une méthode. Méthode bien particulière qui fonde ce qu’on peut appeler le rapport à l’inconscient. Ce rapport n’est jamais établi de manière définitive, l’inconscient ne se prête pas, il continue à produire des formations "dont les conséquences pour les psychanalystes ne sont pas minces", fait valoir Jacques-Alain Miller. Freud a défini l’inconscient comme inépuisable et inaccessible au sujet. De ce fait, l’analyste doit être averti.

En 1973, Jacques Lacan dans le texte établi par Jacques-Alain Miller "Sur l’expérience de la passe" (Ornicar ?, 12/13) indique : "… je n’ai jamais parlé de formation analytique, j’ai parlé de formations de l’inconscient. Il n’y a pas de formation analytique. De l’analyse se dégage une expérience…". Je me permets de qualifier cette expérience aujourd’hui de "un rapport à l’inconscient " dont l’Ecole et la passe peuvent accueillir le témoignage.

Lacan dans le même texte nous donne sa position "s’il y a quelqu’un qui passe son temps à passer la passe, c’est bien moi". Il est évidemment dans son rapport à l’inconscient dans le même sillon indiqué par Freud. Nous différentions évidemment faire une analyse de la relation à l’inconscient. L’analyse peut avoir une fin, le rapport à l’inconscient n’en a pas. D’où la ponctuation de Jacques-Alain Miller : aucun analyste "n’est en aucun cas exonéré de tenter (…) d’éclairer son rapport à l’inconscient". L’Ecole et ses analystes sont concernés particulièrement par cette orientation.

Dans l’entretien d’actualité n° 17 Jacques-Alain Miller évoque la passe à l’entrée. Il y a eu déjà une expérience. Elle a été suspendue. Les modalités et les critères actuels pour entrer à l’Ecole ne sont pas les plus appropriés. Une tendance se fait sentir. Le parcours des candidats dans le vaste réseau du Champ freudien a beaucoup plus de poids que le rapport à l’inconscient. Un équilibre nouveau doit être trouvé entre titres et travaux et rapport à l’inconscient. La passe comme procédure de nomination des A.E. Entre la proposition de la passe comme traversée du fantasme à la passe comme modalité pour éclairer les rapports qu’entretient un psychanalyste avec son inconscient, il y a une distance.

Entre la passe comme témoignage de la fin de l’analyse à la passe en tant que processus de réduction dont le produit est un "c’est ça" (cours de Jacques-Alain Miller 11/2008) il y a une différence. Relancer la passe signifie que la passe a changé et que l’Ecole doit se doter des moyens à la hauteur des modifications de la notion même de la passe. Tous les analystes donc sont concernés par le "rapport à l’inconscient dans toutes ses facettes" :

- Pour l’entrée à l’Ecole ;

- Pour la passe elle-même ;

- Pour la formation des analystes en tant que perpétuellement à refaire par définition.

Francisco-Hugo Freda, Président de l’Ecole de la Cause freudienne

DEBORAH RABINOVICH : Après le CPCT

J'ai eu la chance de participer à l'expérience du CPCT rue de Chabrol depuis sa création, et j'y suis restée pendant deux ans.

J'aurais bien des choses à dire. De l'enthousiasme que cela avait suscité en moi jusqu'aux points qui m'ont été problèmatiques. Mais je vais être très brêve ici.

Suite aux dernières remarques faites et lancées par Jacques-Alain Miller, je vais en effet me limiter à un seul point qui me semble délicat, tellement même qu'il pourrait aller au rebours de la psychanalyse. Il tourne autour du temps limité. Cela se comprend, sachant que la demande est immense à Paris, et que, de plus, le CPCT reçoit ceux qui viennent frapper à sa porte gratuitement.

Mais la question est de savoir comment traiter les cas où le transferí surgit avec l'analyste qui reçoit et que l'on entend une demande de faire une analyse. Il y a là un problème, car il est clair qu'il nous est imposé de ne pas être suspecté par l'Autre social, d'avoir créé le CPCT pour remplir nos cabinets. Cela implique un réel risque de laisser notre éthique de côté. C'est-à-dire que – dans certains cas – celui qui, pour une raison ou pour une autre, irait au CPCT au lieu d'un cabinet privé, se trouverait paradoxalment empêché de faire une analyse.

Et pourtant, Lacan n'avait-il pas dit, que c'est l'offre qui crée la demande ?

PUBLIÉ 74 RUE D’ASSAS À PARIS 6è PAR JAM